LA SEUPA A LA VAPELENENTSE


Quand j’étais petit, on me disait toujours de finir ma soupe, sans quoi je ne grandirai jamais. Seulement voilà ; même si j’avais très envie de grandir, manger de la soupe, c’était une autre histoire. Rien n’y faisait : sitôt que ce liquide fumant m’était servi, tout en moi se révoltait. Lèvres comme soudées, sourcils froncés, estomac gargouillant d’indignation, il allait encore falloir batailler pour que j’avale cette infâme potion. Une vraie soupe à la grimace !

Mais ça, c’était avant que je n’aille passer mes premières vacances chez ma grand-mère valdôtaine. Deux mois passés au grand air de son joli village de Valpelline, à découvrir de nouveaux paysages, de nouveaux amis, de nouveaux goûts. De quoi dépayser complètement un gamin des villes au palais délicat.

Par exemple : en juillet, Valpelline célèbre Saint Pantaléon, son saint patron. On promène sa statue dans les rues et ensuite on se réunit pour faire la fête et manger tous ensemble. Pensez bien que moi j’étais plutôt partant… jusqu’à ce que ma grand-mère me demande de l’aider à préparer – horreur d’horreur – de la seupa à la vapelenentse, le plat principal du banquet. De la soupe en été ? Dégouté par avance, j’ai tout de même bien voulu la suivre jusqu’à la grande cuisine de la commune où d’immenses marmites pleines de bouillon mijotaient déjà. Puis nous avons rejoint d’autres habitants qui s’affairaient tous autour d’une grande table, à empiler plein de tranches de pain et de fromage les unes sur les autres dans de grands plats. « Ah, mais moi je préfère manger ça plutôt que votre seupa », j’ai dit. Et tout le monde a bien ri.

Cet été-là, j’ai donc appris qu’il existait des soupes très particulières, des soupes délicieuses aux saveurs de la montagne.Et maintenant que je suis grand, je peux bien vous l’avouer : en goûtant à cette seupa à la vapelenentse, j’ai fait la paix avec toutes les soupes du monde et dégusté mon meilleur souvenir de vacances.

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